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dimanche 14 janvier 2018

Perséides (Les)..........un recueil de nouvelles de Robert Charles Wilson

Titre : Les Perséides
Auteur canadien d’origine
américaine : Robert Charles Wilson
Première édition en anglais en 2000
Catégorie : recueil de nouvelles SF et fantastiques
293 pages

Photo du livre

Ce recueil de nouvelles de Robert Charles Wilson attendait depuis deux ou trois ans sur mes étagères. N’importe quel roman de sa part aurait été englouti illico presto par ma faim insatiable de textes wilsoniens. Mais cette fois-ci, il s’agissait d’un recueil de nouvelles. Or je n’en ai jamais raffolés. J’avais peur : peur de ne pas prendre de plaisir à lire un Wilson, peur d’être déçu, peur de m’en vouloir de ne pas aimer.

La sortie en septembre de la version poche chez Folio a fait de nouveau parler de ce recueil. C’était le moment ou jamais de m’y risquer.

Prenant mon courage à deux mains, j’ai donc eu l’audace de le saisir, et d’ouvrir l’ouvrage à la première page.

293 pages plus loin, l’évidence était là : j’aurais dû oser plus tôt !


En lisant ce recueil, ne vous attendez pas à trouver des miniatures de ses romans. Le Wilson que l’on connaît est bien présent, sans l’être tout à fait. Wilson nous sert des événements moins spectaculaires que dans ses romans, comme c’est le cas dans Spin (le Soleil qui n’a brutalement plus que 70 ans à vivre), dans Darwinia (l’Europe remplacée par une jungle) ou dans Mysterium (une ville toute entière qui bascule dans une réalité parallèle). Les situations sont ici beaucoup plus simples, et n’ont de conséquences qu’à l’échelle individuelle : un veuf qui s’interroge sur les réalités parallèles ; un homme bipolaire en proie à une situation familiale compliquée ; un écrivain à qui l’on offre un miroir aux pouvoirs étranges etc. Dans ses romans, Robert Charles Wilson créait déjà des personnages forts, aux trajectoires personnelles complexes, mais ils étaient surtout là pour évoluer dans des destins de société. Dans ses nouvelles, ses personnages sont au contraire au coeur même de l’intrigue.

Ses nouvelles diffèrent également de ses romans au niveau du genre littéraire : elles tiennent beaucoup moins de la science-fiction, et tendent vers le fantastique. On ne plonge pas totalement dans le fantastique, car Wilson ne peut s’empêcher de nous donner une pseudo-explication SF à chaque fin de nouvelle (dont on aurait pu se passer), mais le gros du récit est très fantastique, autant dans l’intrigue (une femme qui accouche d’une pierre, une fillette qui voit des monstres, un roi des insectes, une pierre qui permet de voir l’avenir…) que dans la façon dont cela nous est raconté : la perturbation du réel est souvent très légère, et le personnage principal tend souvent à la nier, ce qui est fréquent dans le fantastique.

Comme je l’indiquais, Wilson termine ses nouvelles en rationalisant son propos fantastique par des explications SF. Moi qui suis pourtant un rationnel, qui a justement besoin d’explications, je trouve ici qu’on aurait pu s’en passer. Plus d’une fois, le mystérieux aurait gagné à rester mystérieux. Mais ce défaut reste globalement négligeable, au regard de la qualité d’ensemble, et du régal que j’ai eu à lire ces textes.

Car les qualités de Robert Charles Wilson sont pour la plupart au rendez-vous. Si Wilson ne nous éblouit certes pas ici par ses idées, il nous sert par contre une panoplie de personnages fabuleusement bien réussis. Et il conserve cette capacité, qui m’a toujours impressionné, à happer son lecteur dès la première page. Même avec une nouvelle courte, il parvient ainsi à nous saisir. C’est par exemple le cas d’ “ Ulysse voit la lune par la fenêtre de sa chambre ”, une nouvelle de 14 pages, dans laquelle Wilson nous décrit une simple soirée entre amis. Tout de suite on est pris par le texte, saisi par la tension qui règne entre les personnages : Matthew est invité à diner chez Leah et Paul, un couple d’amis. La dernière fois que Matthew les a vus, il avait embrassé Leah au fond du jardin, à l’abris des regards. Il rêve de pouvoir aller plus loin ce soir-là. Mais Leah semble moins avenante que la dernière fois. Paul est-il au courant de ce qu’il s’était passé ? Ce pourrait être une scénette de théâtre, en huis clos, et cela fonctionne à merveille.

Les thématiques abordées sont très diverses. On y voit certes quelques files conducteurs (la libraire Finders, par exemple, présente dans plusieurs des nouvelles ; mais aussi certains personnages, en arrière-plan dans une nouvelle, puis au centre dans une autre), mais le lecteur y verra avant tout des clins d’oeil amusants. Pour vous donner un aperçu du recueil, mieux vaut donc que je vous écrive quelques mots sur une sélection de nouvelles :

  • ”Les champs d'Abraham” : Au XIXème siècle, à Toronto, Jacob joue des sommes d’argent aux échecs pour permettre à sa sœur et lui de vivre. Sa sœur est schizophrène. Son état mental empire, ce qui risque de lui valoir un licenciement dans l’usine où elle travaille. Jacob joue régulièrement aux échecs contre un libraire, le vieux “Oscar Ziegler” qui tient la librairie Finders. Lorsqu’il gagne, le vieil homme lui donne un livre. Jusqu’au jour où Oscar Ziegler change les règles du jeu, et amène son invité à accéder à un autre monde à chaque partie d’échec disputée.

  • ”La Ville dans la Ville” : Jimmy et Michelle forment un couple heureux. Depuis quelques années, ils ont instauré un jeu avec des amis : ils se réunissent, se lancent un défi, misent chacun une grosse somme d’argent, et se donnent rendez-vous plusieurs mois plus tard, pour déterminer lequel d’entre eux a le mieux relevé le défi, et est donc légitime pour remporter la mise.

    Cette fois-ci, l’un d’entre eux, l’étrange John Carver, leur propose de conceptualiser chacun de leur côté une religion. On verra qui sera le plus imaginatif. Jimmy, marcheur compulsif, se met dès lors à parcourir tant et plus Toronto la nuit, ne passant presque plus de nuits avec sa compagne Michelle. Il décide d’imaginer une religion basée sur une “paracartographie“ de la ville de Toronto.

    Ses déambulations l’amènent peu à peu à sortir de sa réalité et à constater de sévères changements dans sa vie conjugale.

  • ”Divisé par l’infini” : Bill a perdu sa femme il y a un an. Il a 60 ans et pense quotidiennement au suicide. A quoi bon continuer à vivre ? Le hasard d’une promenade à pied l’amène à la librairie Finders, dans laquelle sa femme travaillait. Il décide de rendre visite au propriétaire, un certain Oscar Ziegler.

    Le libraire lui fait cadeau de plusieurs vieux textes de science-fiction que Bill juge très étranges : en tant qu’ancien fan de SF, Bill a une connaissance fine des textes qui ont été écrits dans le genre. Or s’il connaît certes les noms des auteurs de ces curieux romans, les titres lui sont par contre tout à fait inconnus. Oscar Ziegler le persuade assez vite de l’existence de réalités parallèles dans lesquelles auraient été rédigés ces romans. Bill s’interroge alors sur son propre compte : ne se serait-il pas en fait déjà suicidé maintes et maintes fois, survivant systématiquement, mais dans des réalités parallèles ? Bill y croit de plus en plus, et y nourrit l’espérance que sa femme ait quelque part survécu.


mon impression

Je n’ai certes pas dévoré ce recueil avec autant de passion que ce fut le cas pour Spin ou pour Les Affinités. Mais pour me faire lire des nouvelles avec autant d’enthousiasme, cela tient presque de l’exploit. Robert Charles Wilson est une fois de plus parvenu à me charmer, en me servant des personnages et des atmosphères de qualité.

Je suis par ailleurs ravi d’avoir découvert une autre facette de cet auteur, tournée sur une écriture plus fantastique que science-fictive.

Je recommande donc chaudement aux amoureux de Wilson de ne pas passer à côté de ce recueil. Les grands fans de nouvelles y trouveront également leur compte, car Wilson montre ici une bonne maîtrise de ce format.


Chroniques de ce roman sur d’autres blogs : Blog-O-Livre et Les lectures de Xapur.


Roman disponible chez Le Bélial’ et chez Folio SF

2 commentaires:

  1. C'est un excellente nouvelle (désolée, je ne pouvais pas y échapper....)! J'espère être aussi agréablement satisfaite que toi. Je compte le lire très bientôt! :-)

    RC Wilson sait effectivement charmé son monde, je l'aii découvert l'nnée dernière et c'est un auteur coup de coeur!

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    Réponses
    1. Oui j'ai bien vu sur ton blog que tu avais craqué pour lui. Mais j'ai aussi vu qu'il te restait encore bien de ses ouvrages à découvrir. C'est une chance : il te reste donc encore de longues heures à te délecter de ses bouquins !

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